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                   Le Livre noir de  

        NAPOLÉON BONAPARTE [8]

 « La cupidité d'un grand nombre de chefs »

                                   

 

 

                                The Plumb-pudding in danger ;

                                                    _ or _ ,

                      State Epicures taking un Petit Souper

"The great Globe itself and all which it inherit is too small to satisfy such insatiable appetites."

"Le pudding entier en danger, ou les Epicuriens d'Etat prenant un Petit Souper.  

 Le grand Globe lui-même et tout l'héritage qu'il contient est trop petit pour satisfaire des appétits aussi insatiables"

        Caricature de Napoléon Bonaparte et William Pitt

          se partageant le  monde après la paix d'Amiens

                           Eau-forte coloriée à la main     

                           James Gillray  (1756-1815)

                         Graveur, caricaturiste

                                         26 février 1805

                                                        Londres,

                                     édition Hannah Humphrey

                                              18, Old Bond Street

 Library of Congress

(Bibliothèque du Congrès)

                                     Washington,   Etats-Unis

                                  

  Introduction

  Bourrienne

Napoléon, faux-monnayeur

Le maréchal Soult

Les maréchaux Masséna et Berthier

bibliographie

intro

 

Introduction  

 

La guerre enrichit considérablement beaucoup de grands serviteurs de l'Etat, en particulier généraux ou maréchaux, aux "comptes fantastiques",  et il faut bien faire une distinction entre eux et certains officiers qui n'ont eu, ni la volonté ni la possibilité de faire de la guerre une entreprise, mais qui pour un certain nombre se livrent aux pillages et à la corruption, tandis que la plupart sont "plus riches de gloire que d'argent"  (Bertaud, 2006 ;  Crépin, 2007).  

​"Ces officiers deviennent des notables et même des nobles, la noblesse impériale se recrutant essentiellement parmi eux. Retraités, ils occupent des emplois dans l’administration et l’appareil d’État de l’ancienne France, encore en activité, des postes dans ceux des pays annexés ou vassaux (...)  La politique sociale envers les vétérans reflète les inégalités que l’on a déjà vues à l’œuvre au sein même du corps des officiers, encore plus à l’égard des veuves et des orphelins qu’ils laissent."  (Crépin, 2007)

 

"il est vraisemblable que ces vétérans ne sortirent pas de leur situation socio-économique modeste par ces alliances, puisque contractées avec des jeunes filles à la condition tout aussi précaire . Le cas du chevalier de la Légion d’Honneur D. J. Lambert, pour ne citer qu’un exemple, est éclairant à ce sujet. Bien qu’il ait obtenu un emploi de douanier, il ne parvint jamais à s’extraire de l’indigence après son retour à la vie civile . De 1835 à sa mort, survenue en 1849, il fut donc contraint de solliciter l’aide pécuniaire de 250 fr. que le parlement belge votait annuellement à titre de « secours aux légionnaires nécessiteux  ». Si la dotation impériale avait pu l’aider financièrement dans les premiers temps de son union, elle n’avait pu compenser les dépenses liées à l’entretien de son beau-père  ni, plus tard, celles engendrées par la maladie de son épouse et par ses propres infirmités, contractées au service de France."   (Istasse, 2009).  

 

Le régime napoléonien invente aussi des pis-aller, des lots de consolation distribués très parcimonieusement au petit peuple, tels les "mariages de la Rosière", qui réclameront des autorités publiques de chaque chef-lieu d'arrondissement, par arrêté du ministère de l'Intérieur, en l'an X, qu'elles organisent "le mariage d’une jeune fille avec un jeune homme choisi parmi les jeunes gens qui se sont distingués par des traits de courage" (Archives de l'Etat à Namur, V.N., 2793 : Courrier du préfet au maire, 27 fructidor an X / 14.09.1802). Malgré l'appât du gain de 300 francs de dot, la première année fera un flop à Namur, personne ne se présentera (Istasse, 2009).  Dans le même ordre d'idée, Napoléon offrira, par décret du 13 prairial an XII (1804), une dot de 600 francs à "une fille pauvre et honnête" (qualité nécessitant un certificat de bonne moralité) de chaque arrondissement de l'Empire, dont le mariage aurait lieu le jour même se son sacre impérial. L'empereur renouvela la chose à l'occasion de son mariage avec l'archiduchesse Marie-Louise d'Autriche, de la maison des Habsbourg-Lorraine, le 2 avril 1810, mais aussi en l'honneur de la naissance de leur fils, le prince impérial Napoléon François Joseph Charles,  roi de Rome dès sa naissance, le 20 mars 1811 (op. cité).  

Honneur, gloire et richesses : voilà ce que, dès le premier jour, il avait promis à ses compagnons de l'armée d'Italie. Chaque campagne fut pour lui une occasion de tenir, et au delà, cette triple promesse. Les Bulletins de la Grande Armée devinrent le moyen par excellence d'exciter l'émulation des chefs et des soldats, en leur distribuant des brevets d'éloge : Le colonel Mouton, du 1er chasseurs, s'est couvert de gloire ; Le 8e régiment de dragons a soutenu sa vieille réputation. Que n'auraient pas fait les officiers et régiments pour être inscrits sur ce tableau d'honneur, qui les glorifiait devant leurs semblables et qui empêchait leurs noms de périr ? Dans un Bulletin de la campagne de 1806, Napoléon, en nommant la cavalerie de Murat, avait omis l'infanterie de Lannes, qui n'avait pas moins bien fait. Lannes, désolé, vint réclamer pour ses soldats auprès de l'Empereur. Quelle récompense peuvent-ils espérer, sinon voir leur nom publié par les cent voix de la Renommée dont vous seul disposez ? Napoléon lui répondit : Vous et vos soldats, vous êtes des enfants ; il y a de la gloire pour tous. Un autre jour, ce sera votre tour de remplir de votre nom les Bulletins de la Grande Armée.​   

 

Georges Lacour-Gayet, "Napoléon — Sa vie, son œuvre, son temps", Paris Hachette, 1921. 

 

bourrienne

 

  Bourrienne  

 

 

Evoquons maintenant ceux qui ont pu tirer de la guerre le meilleur profit, et commençons par  L. A. Fauvelet de Bourrienne, car ses grenouillages sont partagés par un nombre non négligeable d'autres grands serviteurs de l'Etat. 

 

 "Instinct du trafic, amour du lucre, train de vie fastueux, goût de la bonne chère, Bourrienne avait tout ce qu'il fallait pour s'entendre avec les Hambourgeois, gens de négoce avant tout." (Georges Servières, "Le rôle de Bourrienne à Hambourg, (1805-1810) (Suite et fin)" article de la Revue Historique,  tome 85, Fascicule 1, 1904, pp. 42-67).  ​Amis de très longue date, depuis l'école royale militaire de Brienne-le-Château en Champagne, Bourrienne accompagne Napoléon en Egypte et deviendra son secrétaire particulier, après Brumaire. Drôle d'ami, au demeurant :   "Il vint me trouver et m'offrit de m'informer exactement de toutes les démarches de Bonaparte moyennant 25,000 francs par mois" ("Mémoires de Joseph Fouché, Duc d'Otrante, Ministre de la Police Générale", A Paris, Chez Le Rouge, Libraire, 1824,  p. 188). 

Puis arriva que "la maison Coulon frères, fournisseurs de l'équipement de la cavalerie, fit une faillite de trois millions, il éclata au grand jour que Bourrienne était l'associé de ces fournisseurs. Compromis par les agissements de son secrétaire intime, que fit Napoléon ? D'arrêter Bourrienne, il ne fut pas question. Forcément, il le renvoya, mais avec quels ménagements, avec quelles préoccupations de sauvegarder autant que possible, l'honneur de son ami : Faites solder, écrit-il au trésorier du gouvernement, les appointements du citoyen Bourrienne ; il n'est plus employé près de moi à compter de ce jour, étant promu à d'autres fonctions."  

 

Arthur Lévy, "Napoléon intime", Paris, Nelson, 1893. 

Ces fonctions en question ont encore permis à son ami d'enfance de s'adonner à de nouveaux trafics, cette fois, par des exactions sur les licences d'import-export fausses ou authentiques, accordées à des navires britanniques par exception au Blocus continental.  Napoléon est mis au parfum, se renseigne et évalue, dans une lettre du 1er janvier 1811 au prince d'Eckmühl,  "à 7 ou 8 millions les gains illicites que Bourrienne avait pu faire à Hambourg en délivrant des permis ou en faisant des retenues arbitraires(Georges Servières, "L'Allemagne française sous Napoléon Ier, d'après des documents inédits tirés des Archives nationales et des archives des Affaires étrangères.", Paris, Perrin, 1904, p. 194 Mieux encore, l'empereur dira au Prince être informé du fait que le Sénat de Hambourg versait différents pots-de-vin à des responsables français pour prix de leur silence sur la contrebande allemande.  Davout écrit alors au  général  Jean Dominique Compans (1769-1845), fait grand officier de la Légion d'honneur en 1807 et comte d'Empire en 1808, alors chef d'Etat-major de Davout, avec qui il devint très intime. Compans confirme le profit considérable fait par Bourrienne. Compans lui-même, dont la grande probité était vantée par Davout sera aussi accusé dans cette affaire "d'avoir reçu 30.000 marks banco pour fermer les yeux sur le recel de marchandises anglaises. (Lettres du prince d'Eckmühl des 18 novembre et 27 février 1811)"  (G. Servières, op. cité, : note 1, p. 123).  Le moins qu'on puisse dire, c'était que monsieur le Comte avait été gâté par l'empereur, ayant reçu trois dotations successives : "la première, de 25 000 francs de rente, le 28 août 1808, représentée par le domaine de Schöningen, confisqué au duc de Brunswick et situé à une quarantaine de kilomètres au sud-est de sa capitale ; la seconde, aussi de 25 000 francs, sur des terres de la province de Dannenberg et appartenant aux bailliages de Luchow et de Schnackenbourg, au sud de l'Elbe et à mi-chemin entre Hambourg et Berlin ; la troisième, de 10 000 francs, le 16 janvier 1810, en Galicie. Bien entendu, ces dotations lui furent enlevées par le traité de paix de 1814."  (Girod de l'Ain, 1977). 

      prince d'Eckmühl       :  Louis Nicolas Davout (1770-1823), élevé à la dignité de maréchal d'empire en 1804, fait prince d'Eckmühl (Bavière, Allemagne) en 1809, alors gouverneur général des villes hanséatiques en plus de sa qualité de commandant en chef de l'Armée d'Allemagne (naguère, Armée du Rhin), dont la mission consiste à lutter contre la contrebande.

 

Revenons maintenant à Bourrienne, qui était loin d'être seul à tremper dans le trafic de marchandises anglaises, qui nécessitait tout un réseau, au premier rang duquel on trouvait  Guillaume Brune (1763-1815), fait maréchal dès le lendemain de la naissance de l'Empire, qui était alors gouverneur général des villes hanséatiques. Brune se chargeait, quant à lui, d'envoyer les douaniers (ou les "douanistes") d'un côté, pour que de l'autre, Bourrienne puisse faire entrer les marchandises anglaises.  Ces magouilles auraient rapporté à ce dernier, selon les rapports de police,  la somme de 1.847.500 francs (Georges Servières, "L'Allemagne française sous Napoléon Ier", op. cité,  pp. 119 ;  200).   "Un traité ayant été signé à Vienne, l'armée d'Allemagne fut mise sur le pied de paix et le 7 février 1810 Davout était autorisé à se rendre à Paris : c'est à son chef d'état-major que fut remis le commandement avec des instructions concernant la destruction des marchandises anglaises si sévères que le général s'employa à les tempérer ; l'Empereur l'y autorisa et lui promit sur les rachats un million qu'il ne lui versa jamais.(Girod de l'Ain, 1977). 

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           Die französischen Soldaten  untersuchen am Thor,

         ob keine Englische Waaren hinausgebracht werden

    "Les soldats français examinent à la porte pour voir si                     aucune marchandise anglaise n’est sortie"

                        Scène de guerre de Leipzig n° 3.

 

​              Christian Gottfried Heinrich Geißler

                          (Geissler, 1770–1844) 

                           Gravure sur cuivre colorée,    

                            Leipzig, 1824   (scène de 1806)  

                       Museum Zum Arabischen Coffe Baum

                                   ("Musée du Caféier arabe")

                                        Leipzig, Allemagne

                                  

 

Nous connaissons le détail des noms et des bénéficiaires de ce juteux trafic par deux lettres écrites du château de Saint-Cloud par Napoléon, à destination de son ministre du Trésor Public (1806-1814)  Nicolas-François Mollien  (1758-1850). La première date du 13 juin 1811 et la seconde, est datée du 22 juin.  Nous allons maintenant les examiner. 

N-F Mollien  est fait comte de l'Empire par Napoléon en 1808, qui l'élèvera à la dignité de Commandeur (1808), Grand-officier (1809), et enfin, Grand-Aigle (1813) de la Légion d'honneur, mais aussi Grand-Croix de l'Ordre impérial de la Réunion 

en 1811, la même année où il a été fait chevalier de l'Ordre de l'Eléphant, un ordre honorifique du Danemark. 

À partir de 1806 et jusqu’en 1814, devenu ministre du Trésor, MOLLIEN reçut le traitement annuel de 120 000 F et l’indemnité de premier établissement de 25 000 F. Entre 1807 et 1813 il fut donataire de nombreuses rentes sur les biens de Westphalie, de Hanovre, d’Illyrie, des départements de l’Arno et de Gênes, ainsi que sur le Canal du Midi, mais ces somptueuses largesses, qu’il comprit dans le majorat attaché à son titre de comte, furent perdues en 1814, à l’exception des 20 actions de la Compagnie du canal du Midi. Le 14 avril 1813 Napoléon lui fit verser 100 000 F « gratification accordée comme témoignage de ses services ». À quoi s’ajoutèrent à partir de 1809 les 5 000 F de traitement annuel de grand-officier de la Légion d’honneur. En revanche les dotations de grand-aigle furent perdues en 1814.

 (Antonetti, 2007)

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 Nicolas François Mollien

Ministre du trésor Impérial,

Grand-Croix des Ordres de la Réunion

et

de l’Eléphant de Danemarck,
Grand-Aigle de la Légion d’honneur.
  

 

​      Gravure colorée de Philippus Velijn (Velyn, Vilyn)

                      (graveur hollandais, 1787 - 1836) 

 

     d'après un dessin de Marie-Thérèse de NOIRETERRE                                             (1760 – 1823)   

     

                       vers 1810 - 1815           290  x  210  mm 

                                 collection particulière

                                       

 

 Les lettres susdites avaient été exclues de la Correspondance de Napoléon Ier  (publiée par ordre de Napoléon III  : 32 tomes, courant de 1793 à 1821,  Paris, Henri Plon et J. Dumaine, publiés de 1858 à 1870),  mais  elles sont bien présentes dans les Lettres inédites de Napoléon Ier éditées par Léon Lecestre en 2 tomes, Paris, Plon, Nourrit et Cie, 1897 / Archives Nationales, Collection des minutes de la correspondance de Napoléon, AFIV  869.  

Par la lettre datée à Saint-Cloud du 13 juin 1811 "Au Comte Mollien, Ministre du Trésor Public", l'empereur déclare envoyer "l'état des sommes que les villes de Hambourg, Brême et Lubeck ont payées à différents Français" en demandant à son ministre de lui faire un rapport sur le sujet.      Dressons en un récapitulatif, dans l'ordre cité par Napoléon. 

 

 -  Bourrienne a reçu en 1806 de Hambourg les sommes de 150.000, 300.000 et 45.000 francs, soit 495.000 francs, que Napoléon rectifie à la hausse par la lettre du 22 juin, soit  670.000 fr. 

-  Pour Brémond,  250.000 fr.  François Joseph Dominique de Brémond, 1773-1852, fait général de Brigade par Masséna [cf. plus bas] en 1799), alors "inspecteur aux  revues" (administrateur, gestionnaire de troupes militaires), 

-  Pour le consul  La Chevardière, 130.000 fr.  Il s'agit d'Alexandre-Louis Lachevardière (1765-1827),  qui a été commissaire aux armées de l'Ouest en 1793, secrétaire général de la police, consul de Palerme , Hambourg, puis Dantzig à partir de 1807.   

-  Pour le maréchal Brune, 400.000 fr, puis 100.000 fr, (40.000 fr. pour son secrétaire),  soit 500.000 fr, somme relevée à 785.000 fr pour le maréchal et 99.000 fr. pour son secrétaire, dans la lettre du 22. 

-  Pour Ricard, "commissaire des guerres",  quatre paiements de 10.000 fr, pour une somme totale un peu diminuée dans la seconde lettre. 

Suivent des sommes versées aux sieurs Durand (30.000 fr au total) et  Laborie (70.000 fr).   

 cf. "Lettres Inédites..." op. cité, Tome Second, 1810-1815, pp. 138-141 ).   

Par la lettre du 22 juin, Napoléon rajoutent aux noms des débiteurs : 

- pour 250.000 francs,  le général Girard (Jean-Baptiste G., 1775-1815, baron d'Empire en 1808, grand officier de la Légion d'honneur en 1811, comte de l'Empire en 1815, etc., fait Duc de Ligny par Napoléon à titre posthume en 1815.  

- pour 20.000 fr, le général Allemand, introuvable dans le "Dictionnaire biographique des généraux & amiraux français de la Révolution et de l'Empire", de Georges Six (2 tomes, Paris, 1934). 

-  pour 33.000 fr, "le payeur Poulain"

- pour 680.000 fr., M. de Talleyrand (cf. aussi 1e partie, "Talleyrand, Prince des voleurs")

En plus des noms déjà cités dans la première lettre, Napoléon cite plusieurs particuliers dont Napoléon ne nous précise pas la qualité  (cf. "Lettres inédites", op. cité, p. 140-141).  C'est assez pour nous montrer que de hauts responsables étaient impliqués dans la contrebande sur les marchandises anglaises, que Napoléon les mettra simplement à l'amende sans aucune conséquence fâcheuse pour leur carrière, au contraire, il suffit de consulter le parcours de Bourrienne, Brune ou Talleyrand, par exemple.  

faux-monnayeurs

 

Napoléon,  faux-monnayeur

 

Plus tard, Bourrienne, justement, participera à des activités de faux-monnayage, dans lesquelles on découvrira un nouveau visage de Napoléon,  faux-monnayeur en chef, que nous allons présenter maintenant. 

Ce faux-monnayage au plus  haut niveau de l'Etat n'était en rien une pratique nouvelle. Pour ne parler que de la période qui nous concerne, on sait d'après Barras que le Directoire a fait fabriquer de faux billets autrichiens, dans les ateliers de l'Armée de la République cisalpine et écoulés en Italie : "Au moment de Marengo, Bonaparte était parfaitement informé de ces pratiques et les encourageait, de même qu’il approuva la fabrication de faux florins. Ces activités se poursuivirent par la suite et les services de police des pays en guerre avec la France saisirent de tous temps des coupures suspectes" (Thierry Lentz, "Quand  Savary et Fouché faisaient fabriquer de la fausse monnaie…", article  de la Fondation Napoléon)

 

L'activité de contrefaçon touchait aussi les livres sterling  :

 

"Hoche prévient les départements qui sont sous son commandement que de faux billets de banque d'Angleterre sont répandus à profusion, comme le furent les faux assignats à Quiberon [rapportés par des émigrés, NDA] et les faux louis donnés par les Anglais à Stofflet.

   Des messages sont envoyés au Conseil des Cinq-Cents, demandant que deux cents millions soient mis à la disposition du ministère de la guerre, et cinquante à celui de la marine."  

'Si, dans ces Mémoires où je ne crois devoir rien taire de ce que comme gouvernement nous avons fait à tort ou à raison, par spontanéité ou par entraînement, j'ai dû révéler un fait aussi grave, et qui peut rester à notre charge, ce n'est pas que je prétende qu'il soit possible de le justifier par aucun des prétextes qu'on appelle les nécessités de la guerre, pas même par le droit de représailles. Ce moyen antisocial et vraiment infernal a été depuis déployé plus en grand par Bonaparte contre les banques de Vienne, de Hambourg, de Londres, etc. Il était réservé à ce génie satanique de surpasser tout ce qu'il y a eu de plus mauvais dans les plus désastreuses inventions de la politique."

 

 "Mémoires de Barras, Membre du Directoire...",   4 volumes ,  publiés par Victor Duruy, à la Librairie Hachette et Cie, en 1895 et1896, tome II, "Le Directoire jusqu'au 18 fructidor", Paris, 1895,  p. 90     et     p. 275 

 

Barras dit vrai. Non seulement Napoléon n'a pas mis pas fin au brigandage d'Etat relatif au faux-monnayage, mais il l'a développé.  Quatre ans à peine après sa disparition, en 1825, était publié un ouvrage  qui rapportait les mésaventures de M. J.  Castel, armateur de Hambourg, qui s'était vu refourgué 5000 (fausses) livres sterling par le général Louis François Saunier (761-1841), pour la construction de corvettes confiée par le gouvernement français ("Extrait d'un Mémoire sur la fabrication de faux billets de banque anglais...' dans "Chronique indiscrète du dix-neuvième siècle, ouvrage collectif de Jean-Joseph Regnault-Warin, Pierre Lahalle et Jean-Baptiste-Bonaventure de Roquefort-Flaméricourt, Paris, Chez les Marchands de Nouveauté ; Lettre XVIII,  p. 111.

 

Cependant, si le sieur Castel ignorait tout des dessous de ce trafic,  le comte Guillaume de Garden (1796-1872), qui avait été ministre plénipotentiaire, savait déjà que Napoléon  "s'efforçait de ruiner ses ennemis en contrefaisant leur papier-monnaie. A cet effet, il avait fondé à Paris, dans le quartier du Montparnasse, un atelier où l'on fabriqua successivement des billets de la Banque de Londres, puis de la Banque viennoise et de celle de Saint Pétersbourg ; trois agents avaient été envoyés en Angleterre pour y répandre cette marchandise frelatée. L'un d'eux, un juif nommé Malchus, fut pris et pendu ; les deux autres parvinrent à s'échapper." (compte-rendu de la brochure du comte de Garden, "Un éclair d'histoire, ou l'empereur Napoléon Ier faux monnayeur ; extrait des documents secrets et inédits de feu M. le comte DE GARDEN, etc., etc. Bruxelles, i877",  dans la Revue belge de numismatique, 33e année, 1877). 

En 1899, le journaliste Louis Etienne Baudier de Royaumont (1854-1918) écrivait un article de 33 pages dans Humanité Nouvelle, intitulé "Napoléon Ier, faux monnayeur  : essai historique sur les émissions de faux billets des banques étrangères opérées par les ordres de Napoléon 1er", titre en partie repris par un article de l'ouvrier anarchiste André Lorulot (André Georges Roulot, dit, 1885-1963), en 1919, dans une revue libertaire qu'il a fondée en 1911, L'Idée libre (n° 10, Série 1, 7 pages), lui-même condamné, par ailleurs, pour faux-monnayage en 1915 (notice biographique de la Fédération Nationale de la Libre Pensée). Enfin, se basant sur l'opuscule de Royaumont, Louis Hastier écrira "Napoléon faussaire", dans la 5e série de ses "Vieilles histoires, étranges énigmes" (Paris, fayard, 1961).  

Revenons maintenant au déroulé de ces affaires d'Etat. En 1806, Napoléon ordonnait à Fouché de voler purement et simplement les coffres de la banque de Vienne : "A M. Fouché, Ministre de la Police Générale. Saint-Cloud, 1" juin 1806. Il y a 100 millions de billets de la banque de Vienne au greffe de la cour criminelle de Strasbourg. Concertez-vous avec le grand juge pour les faire venir à Paris d'une manière sûre."  (Lettres Inédites de Napoléon Ier, an VIII -1815, Tome Premier, an VIII - 1809,  Paris, 1897, p. 68 ; Archives Nationales, Collection des minutes de la correspondance de Napoléon, AFIV  869). 

 

Trois ans plus tard, en 1809, c'est carrément une grande opération de faux-monnayage qu'ordonne Napoléon à son ministre de la Police : 

"Au Comte Fouché, Ministre de la Police Générale,  Schönbrunn, 5 septembre 1809. 

.le vous avais, dans le temps, prescrit différentes dispositions relatives aux billets de la banque de Vienne. Je n'en ai plus entendu parler. Je suppose que vous avez suivi cet objet. Je désire que vous m'envoyiez ici tous ceux qui existent, et que vous suiviez avec la plus grande activité toutes les dispositions que j'ai ordonnées."  (Opus cité, p. 356, AFIV  882)

      billets  de la banque de Vienne       :  Banco-Zettel (bancozettel, litt. "petits papiers de banque"), appellation de ces premiers billets de banque en gulden (florins) apparus au début du XVIIIe siècle dans les principautés allemandes, puis en Autriche. 

banco-zettel-florin-gulden-vienne-autriche-1806.jpg

 

La dépêche du jour suivant, le 6 septembre, adressée à Fouché du même endroit, est cette fois plus explicite et ne laisse aucun doute sur les activités de faussaire dont Napoléon était le cerveau, lui qui, l'année suivante, publiait son propre code pénal de 1810, qui condamnait très sévèrement les activités de faux-monnayage à différentes peines de carcan, de réclusion, de travaux forcés, jusqu'à la peine de mort, assorties à des confiscations de biens  (articles 132 à 144), au moment même où lui-même et ses services de police sévissaient en la matière : 

"Maret vous enverra une collection de toutes les différentes espèces de billets de banque. Vous trouverez ci-joint une ordonnance relative à cet objet. Je désire que vous montiez une fabrication de ces billets de toutes les valeurs, jusqu'à la concurrence de 100 millions. Il faudrait monter une machine qui pût en fabriquer 10 millions par mois. C'est avec le papier-monnaie que la maison d'Autriche a pu me faire la guerre ; c'est avec le papier-monnaie qu'elle pourra encore me la faire. Cela étant, il est de ma politique, en temps de paix comme en temps de guerre, de détruire ce papier-monnaie et d'obliger l'Autriche à revenir au système du numéraire, qui, par sa nature, la mettra dans la nécessité de réduire son armée et les dépenses folles par lesquelles elle a compromis la sûreté de mes Etats. Mon intention est que cette opération se fasse avec secret et mystère. Cependant le but que je me propose est bien plutôt le but politique qu'un avantage de spéculation et de gain. Cet objet est extrêmement important. Il n'y a pas de tranquillité à espérer en Europe, tant que la maison d'Autriche pourra se donner des avances de 3 à 400 millions par le crédit de son papier-monnaie. Envoyez un agent intelligent et adroit, qui vienne prendre ici, tandis que nous y sommes, tous les renseignements nécessaires pour donner à cette affaire l'étendue que je veux lui donner et qui aura une si grande influence."  ("Lettres Inédites...", op. cité, p. 356-357, AFIV  882 ). 

    Maret      :    Hugues-Bernard Maret (1763-1839), secrétaire d'Etat depuis 1799, fait duc de Bassano par Napoléon en1809. 

 

Le 23 septembre, l'Empereur donnait à Fouché des instructions supplémentaires  :

"Maret vous envoie ce que vous demandez. En paix comme en guerre, je vous répète que j'attache le plus grand prix à avoir 100 ou 200 millions de billets. Cela est une opération politique. Quand la maison d'Autriche n'aura plus son papier-monnaie, elle ne pourra plus me faire la guerre. Vous pouvez établir l'atelier où vous voudrez, dans le château de Vincennes, par exemple, d'où l'on retirerait les troupes et où on ne laisserait entrer personne. Cette rigidité serait motivée par le voisinage des prisonniers d'État. Ou dans tout autre endroit. Mais il est urgent et important que vous vous occupiez sérieusement de cette affaire. Si j'avais détruit ce papier, je n'aurais pas eu cette guerre."  (Op. cité, p.367, AFIV  882). 

Finalement,  cette opération viennoise aurait été annulée,  aux dires de l'empereur : 

"Faites à M. de Metternich une réponse dont vous me montrerez le projet, dans laquelle vous lui direz que, pendant mon séjour à Vienne, j'avais fait fabriquer à Paris des billets de banque, parce que j'étais en possession de la plus grande partie du pays et qu'on continuait à faire de ces billets en Hongrie ; mais qu'aucun de ces papiers n'a été émis, parce que je me suis avisé de cette idée un peu tard, et que les premiers envois allaient se faire quand la paix a été signée; que, depuis, tous ces billets ont été brûlés et anéantis, comme de raison."   (Lettre de Napoléon à M. de Champagny, Duc de Cadore, Ministre des Relations extérieures,  Saint-Cloud, le 24 juin 1810, dans "Lettres Inédites...", op. cité, Tome second, p.43). 

      Metternich      :  Klemens Wenzel (Clément Wenceslas), 1773-1859, de haute noblesse rhénane, diplomate, ambassadeur en France de l'Empire d'Autriche (1806-1809), puis Ministre des Affaires Etrangère de l'Empire d'Autriche (1809-1848).       

 

Mensonge plus gros qu'une maison. En réalité, ce sont près de quarante millions de florins qui ont été mis en circulation, ce qui "acheva de déconsidérer cette monnaie ("Une chronique de Pierre Branda : « Napoléon Ier plus grand faux-monnayeur de l’Histoire ? »", article  de la Fondation Napoléon).  Ainsi, l'empereur d'Autriche, l'année suivante, en 1811, fut "contraint de les retirer de la circulation. Jamais une fausse monnaie n’avait autant sapé l’existence de la bonne.(op. cité). 

Pour cette entreprise de faux-monnayage, Napoléon dispose à compter du mois d'août 1809 d'un réseau fondé d'abord sur d'indispensables et talentueux techniciens de l'affaire, à savoir le sieur Jean Denis Lale (1774-1847), "premier graveur d'écriture" au Dépôt général de la guerre, des imprimeurs en taille-douce, des imprimeurs pressiers, des organisateurs en chef :  les ministres de police Fouché, puis Anne Jean Marie René Savary (1774-1833), général d'Empire, alors commandant de la gendarmerie d'élite, qui le remplace en 1810, secondés par le chef de la police secrète Pierre-Marie Desmarest (Desmaret, Desmarets, 1764-1832), auxquels il faut ajouter des collaborateurs qui facilitent l'écoulement de la fausse monnaie, tels Bourrienne, que Napoléon avait fait "ministre plénipotentiaire" (sorte de diplomate) à Hambourg, en 1805, où il écoulera plus tard de la fausse monnaie anglaise, aidé en particulier d'un espion de la police française, Karl Ludwig Schulmeister (Charles Louis S., 1770-1853, commissaire général de police à Vienne).  Il existe, d'ailleurs, sur le sujet, une dépêche du 4 mars 1810,  commandant ainsi à Fouché  : "faites faire des billets de la banque de Londres"   (Lettres Inédites... op. cité, Tome Premier, Préliminaires, p. 11). 

Le 1er août 1810, le duc de Rovigo (Savary), fraîchement nommé à la place de Fouché, finit par délivrer  à Lale, impatient d'assurer sa sécurité,  l'attestation d'une fausse mission impériale pour couvrir les activités officieuses qui  lui ont été confiées :  "M. Lale, étant chargé de dresser des cartes très-secrètes pour le cabinet de Sa Majesté, ne devra communiquer absolument avec qui que ce soit, excepté avec les artistes qui sont nécessaires à la confection de l'ouvrage.
   Si, pour quelque motif que ce puisse être, un officier de police civil ou judiciaire se présentait chez lui, porteur d'ordres, de quelque nature qu'ils soient, M. Lale devra leur exhiber la présente réquisition, et il est expressément défendu audit officier de police de pénétrer dans le local où se fait le travail, de faire aucunes questions ou perquisitions qui y soient relatives ou qui puissent nuire au secret ; mais, au contraire, de se retirer sur-le-champ auprès de l'autorité qui l'a envoyé
"
   ("Papiers et correspondance de la famille impériale, chapitre LXIX, "Faux billets de banque étrangers fabriqués par ordre de Napoléon Ier", Paris, Imprimerie Nationale, 2 tomes, 1870-1872  ;  édition de  Paris, Garnier Frères, 1875, tome premier,  p. 280-281 ).   

Le même ouvrage reproduit le récit de Lale sur cet épisode de sa vie, que sa nièce, Mlle de Montaut, transmettra après son décès à Napoléon Hugues Joseph Maret, duc de Bassano (1803-1898), fils du précédent (cf. plus haut), accompagné de deux lettres, celle de Savary et celle du sous-directeur du Dépôt de guerre. On y apprend qu'un beau jour, en pleine opération de faux-monnayage, un commissaire de police nommé Masson (que Lale orthographie "Maçon"), qui a eu vent d'une imprimerie suspecte, au 25 boulevard du Montparnasse, y lance un assaut en l'absence du graveur : plusieurs ouvriers sont grièvement blessés avant que l'officier de police n'ait eu connaissance du sauf-conduit  délivré à Lale ("Extrait du journal du travail de gravure qui m'a été confié pour le service particulier du cabinet secret de S. M. l'Empereur", dans "Papiers... ", op. cité, p. 281 à 308 ; citation  p. 293).

 

Vint le moment où on demande à ce dernier de contrefaire des billets originaires de Prusse, mais la Prusse était alors en paix avec la France, et Lale refusa de s'y soumettre, choix que respecta Savary, qui abandonna le projet (p. 294-295).  On apprend ensuite que quatre des agents qui faisaient passer les faux billets en Angleterre ont été arrêtés et punis de mort (p. 296).  Plus loin, Lale évoque la visite surprise de l'empereur lui-même à l'officine des faussaires (p. 297), accompagné du général Géraud Christophe Michel du Roc dit Duroc (1772-1813), fait grand maréchal du Palais en 1805. Puis, après une pause, une nouvelle demande de contrefaçon lui est présentée par Desmaret, qui a "ordre du ministre de faire contrefaire les assignats et le papier de banque de la Russie(op. cité, p. 299),  travail d'ampleur qu'il a conduit avec son beau-frère Pauquet, graveur comme lui, et qui a nécessité l'usage de 23 presses utilisées chaque jour et deux imprimeries entre Vaugirard (du sieur Malo) et Montparnasse (de M. Fain, imprimeur-typographe, frère d'un aide de Napoléon), dont les "profits étaient considérables" (p. 302).  Il aura "aussi été question de papier d'Espagne, mais ce projet n'a point eu de suite." (p. 302).  Par contre, "à l’instigation de Napoléon Ier, de faux assignats furent introduits dans la circulation, pour affaiblir les finances russes. Ils sont reconnaissables à leurs signatures imprimées. La masse monétaire en assignats, de 163,6 millions de roubles en 1797, était multipliée par cinq en 1817."   (Muszynski, 2020).  Louis Hastier avait évalué la somme des faux-roubles à un demi-milliard :  "trente-quatre fourgons auraient été nécessaires pour leur transport et la plupart des billets auraient été enfouis dans les fossés de la citadelle de Torgau après la bataille de Leipzig."   (L. Hastier, op. cité)

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            Faux assignat russe de Napoléon            

            Napoleonovska, Napoleonovski 

                   Billet de 50 roubles

        Musée-réserve de Nijni Tagil (Taguil)

          Oural, Oblast de Sverdlovsk, Russie

            

À la fin de l'année 1811, les souverains de l'Europe occidentale renforcèrent leurs armements, et concentrèrent leurs troupes. En 1812, ces forces réunies, qui se composaient de millions d'hommes, y compris, et ceux qui les commandaient, et ceux qui devaient les approvisionner, se mettaient en marche vers les frontières de la Russie, qui, de son côté, dirigeait ses soldats vers le même but. Le 12 juin, les armées de l'Occident entrèrent en Russie, et la guerre éclata !... C'est-à-dire qu'à ce moment eut lieu un événement en complet désaccord avec la raison et avec toutes les lois divines et humaines !

Ces millions d'êtres se livraient mutuellement aux crimes les plus odieux : meurtres, pillages, fraudes, trahisons, vols, incendies, fabrication de faux assignats... tous les forfaits étaient à l'ordre du jour, et en si grand nombre, que les annales judiciaires du monde entier n'auraient pu en fournir autant d'exemples pendant une longue suite de siècles !... Et cependant ceux qui les commettaient ne se regardaient pas comme criminels !

(...)

Le soir même, Napoléon, après avoir lancé l’ordre d’accélérer l’envoi des faux assignats destinés à la Russie, et après avoir fait fusiller un Saxon sur lequel on avait saisi des renseignements sur la situation de l’armée française, décora de l’ordre de la Légion d’honneur, dont il était le chef suprême, le colonel des uhlans qui, sans nécessité, s’était précipité dans l’endroit le plus profond du fleuve !…    Quos vult perdere, Jupiter dementat !​ 

Léon Tolstoï, "La Guerre et la Paix" (Война и миръ),  roman publié en feuilleton de 1865 à 1869, dans le mensuel  Le Messager russe  (Русскій Вѣстникъ),  puis en entier en six volumes, en 1868 et 1869 ;  citation dans la traduction d'Irène Paskévitch, Tome II,  Deuxième partie, "L'Invasion 1807-1812", chapitre IV, Hachette, 1901, p. 215

 

Enfin s'attendant, si une victoire et la prise de Moscou n'accablaient pas le courage d'Alexandre, à revenir hiverner en Pologne, il voulut que soit avec de l'argent, soit avec des réquisitions, on levât en Lithuanie et en Pologne 1200 mille quintaux de grains, 60 mille bœufs, 12 millions de boisseaux d'avoine, 100 mille quintaux de foin, 100 mille de paille, et qu'on réunît ces vastes approvisionnements à Wilna, à Grodno, à Minsk, à Mohilew, à Witebsk, à Smolensk. Il y avait là de quoi nourrir l'armée pendant plus d'un an, et il était très-possible, surtout avec de l'argent, de se procurer ces denrées en Pologne. Napoléon avait amené à sa suite un gros trésor en numéraire, et de plus de faux roubles en papier, qu'il avait sans aucun scrupule fait fabriquer à Paris, se croyant justifié par la conduite des coalisés, qui, à une autre époque, avaient rempli la France de faux assignats.

(...)  

Les roubles en papier étant la monnaie qui avait cours en Russie, et le trésor de l'armée en contenant une quantité dont nous avons dit l'origine, ignorée de tout le monde, il fit annoncer qu'on payerait comptant les vivres apportés dans Moscou, surtout les fourrages, et recommanda expressément de protéger les paysans qui répondraient à cet appel ; il fit acquitter la solde de l'armée en roubles-papier, ayant toutefois la précaution d'ajouter (ce qui était un acte indispensable de loyauté envers l'armée) que les officiers qui désireraient envoyer leurs appointements en France, auraient la faculté d'y faire convertir en argent, à tous les bureaux du trésor, ces papiers d'origine étrangère.

Adolphe Thiers, "Histoire du Consulat et de l'Empire", Tome quatorzième,  Livre XLIV, Moscou,  Paris, Paulin, 1856, p. 282 . 

 

 

Le fait que Napoléon ne se soit pas enrichi, semble-t-il, personnellement par ses activités de faux-monnayeur n'empêche pas d'avoir causé toutes sortes de dégâts humains, nous l'avons vu, qui s'ajoutent à sa longue liste de méfaits délétères pour toutes les sociétés d'Europe concernées. 

 

Continuons avec l'exemple du  maréchal Soult (Nicolas Jean-de-Dieu S., 1469-1851), que Napoléon fera Duc de Dalmatie en 1808, qu'il estime être, dans sa correspondance à Sainte-Hélène le "plus grand pillard" parmi ses généraux (Jean Tulard, "L'Empire de l'argent — S'enrichir sous Napoléon", Editions Taillandier, 2023). Napoléon, pourtant, ne cessera de rendre hommage à ces derniers et de fermer les yeux sur bon nombre d'actes de corruption de ses hommes ou même de sa propre famille, tant qu'il estimait que les uns ou les autres avaient des talents qui lui étaient utiles. 

 

Ainsi, Soult a eu beau déserté le camp de Boulogne "portant tous mes secrets aux Anglais", raconte Napoléon, il peut revenir plus tard la bouche en cœur et allécher son maître par le fait qu'il "connaissait leurs ressources, leurs moyens".  Des années plus tard, l'empereur trouve différents (faux) prétextes pour ne pas l'avoir fait fusiller : "Je le fis arrêter ; et, comme il avait été jugé et condamné, je suis encore à savoir pourquoi on ne l'a pas fusillé ; il faut qu'on en ait pas eu le temps, ou qu'il ait été oublié ; c'était un châtiment que réclamait la patrie : il ne saurait y avoir ni transaction ni indulgence pour le général qui a l'infamie de se prostituer à l'étranger."

"Las Cases, "Memorial de Sainte-Hélène, ou Journal où se trouve consigné, jour par jour, ce qu'a dit et fait Napoléon durant dix-huit mois", 9 volumes, Imprimerie Lebègue, 1823 ; cité dans l'édition d'Ernest Bourdin : "Mémorial de Sainte-Hélène, par le Cte de Las Cases : suivi de Napoléon dans l'exil par MM  O'Méara et Antomarchi, et de l'Historique de la translation des restes mortels de l'Empereur Napoléon aux Invalides", Tome second,  Paris, 1842, p. 127

L'Espagne, nous le verrons, a été le lieu de beaucoup de crimes, offrant le spectacle d'une  guerre terrifiante, sur laquelle écrira le colonel Gaspard de Clermont-Tonnerre, alors aide de camp du roi Joseph Bonaparte, n'hésitant pas à dénoncer à de nombreuses reprises la cupidité de beaucoup d'officiers français : 

"la cupidité d'un grand nombre de chefs",

"la cupidité de nos généraux commençait à devenir formidable", 

"la cupidité des chefs de corps",

"La cupidité et la mauvaise foi furent poussées au point que quiconque prétendait faire une acquisition en agissant directement et conformément aux décrets, se trouvait dans l'impossibilité de l'effectuer, et voyait la propriété qu'il désirait (ce dont je citerai vingt exemples) passer dans d'autres mains pour un prix inférieur à l'offre qu'il avait faite longtemps auparavant" 

"la cupidité insatiable du plus grand nombre",

 

Cahiers sur la guerre d'Espagne d'Aimé-Marie-Gaspard de Clermont-Tonnerre, 1779-1865, édités sous le titre  "L'expédition d'Espagne : 1808 - 1810", préface de Michel Poniatowski,  introduction et notes de Catherine Desportes, Editions Perrin, 1983, pp. 236, 267,417,  420, 424. 

Le manuscrit provient du château d'Ancy-le-Franc et faisait partie de "la vente de la bibliothèque, des archives et de la correspondance  du duc de Clermont-Tonnerre, vente qui eut lieu à l'hôtel Drouot, les 6 et 7 avril 1981" (C. Desportes, op. cité, introduction, p. 53) 

 

​"C’est que la guerre d’Espagne, viciée dans ses fondements et dans les modalités de son engagement, a tiré vers le bas ces militaires, vite conscients qu’ils avaient plus à perdre qu’à gagner dans cette affaire « mal embarquée », comme l’a reconnu Napoléon lui-même. Vue du côté français, cette guerre sale… salit ceux qui la conduisent sur le terrain ou, pour mieux dire, ceux qui la subissent, à tous les échelons de la hiérarchie." (Aymes, 2008)

​​​

soult
cahiers clermont-tonnerre

 

 En 1809, Soult remplaçait le général Jourdan comme major général de l'armée d'Espagne, où "il s'était emparé de tableaux de plus grand prix, qu'il envoya, non au musée du Louvre, mais à son château de Soultberg" ("Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle..." par Pierre Larousse, Tome quatorzième, SOULT, p.934 ). En plus des peintures qu'il a pu acquérir ou de celles qu'on a pu lui offrir, le maréchal s'accaparera d'un nombre considérable de tableaux de maîtres espagnols, tels  Murillo (15 œuvres ! cf. "catalogue raisonné...", ci-dessous), José de Ribera (4), Zurbaran (18 !, op. cité), Alonzo Cano (7), Herrera, Pacheco, Ribalta, pour ne citer que quelques peintres célèbres : on trouvera un aperçu détaillé de sa collection chez Frédéric Mercey ("La Galerie espagnole du Maréchal Soult", article de la Revue des Deux Mondes, Nouvelle période, tome 14, 1852, pp. 807-816) ou encore mieux, dans le "Catalogue raisonné des tableaux de la galerie de feu M. le Maréchal-Général Soult..." préparé pour la vente de sa collection en mai 1852, qui rapporta la coquette somme de 1.467.351 francs ("Grand Dictionnaire..", op. cité).  

Comme Soult, le maréchal Victor-André Masséna était largement cupide : "Masséna n'est bon à rien dans un gouvernement civil ; il n'est d'ailleurs point susceptible d'attachement. C'est un bon soldat mais entièrement adonné à l'amour de l'argent ; c'est là le seul mobile de sa conduite, et il n'y a que cela qui l'ait fait marcher, même sous mes yeux.  C'était d'abord par de petites sommes ; aujourd'hui des milliards ne suffiraient pas."


 Correspondance de Napoléon Ier,  (cf. aussi La Correspondance générale de NapoléonLettre à Joseph Bonaparte, "Saint-Cloud, 3 juin 1806 au roi de Naples" Archives de la Secrétairerie d’État et du cabinet de Napoléon Ier, AF IV 869. Archives Nationales de France. 

Depuis la première campagne d'Italie, "la réputation de Masséna n’est plus à faire" (Gainot et Martin, 2020), en particulier depuis le sac qu'il opéra à l'automne 1797 dans le Padouan (région de Padoue), où sa division était établie depuis le mois de juin. L'année suivante,  à Rome, en 1798,  Masséna "est accusé de couvrir les pillards"  (Maurice Choury et André Castelot, "Les grognards de Napoléon" Perrin, 1968). Ceux-ci, sous les ordres des généraux Masséna et L-A Berthier et dilapident les trésors de Rome malgré le pillage officiel massif imposé, nous l'avons vu, par le traité de Tolentino, l'année précédente (cf. partie I).  Le 23 avril, les deux généraux décident "d'étendre  les saisies d’argenterie sur les églises « privilégiées » appartenant à l’Autriche et à l’Espagne, alors qu’elles étaient jusqu’ici limitées aux seules puissances en guerre contre la République. Dans les deux cas, il s’agit uniquement de dégager des fonds pour éteindre la mutinerie qui se développe alors à Mantoue ; dans les deux cas, c’est à Berthier qu’en revient l’initiative ; mais, dans un cas comme dans l’autre, c’est à la rapacité de Masséna qu’ils sont imputés."  (Gainot et Martin, 2020).  

 

Les deux généraux finiront par provoquer la colère de plus de trois cents officiers, en majorité capitaines, mais aussi des lieutenants et sous-lieutenants, dépourvus de solde depuis plusieurs mois, qui se réuniront par milliers à la Rotonde (basilique du Panthéon), à partir du 24 février 1798 et y rédigeront trois jours plus tard une pétition à l'adresse du Directoire, entamant une longue insurrection militaire, qui durera presque un mois, suscitant aussi   un soulèvement  populaire,  très vite réprimé, cependant.   Les signataires mettent l'honneur en première ligne, ravi par "une poignée de brigands" dont la "conduite déshonorerait aux yeux de l'Univers entier la Nation française("Les grognards... op. cité).  Les brigands en question ne seront pas inquiétés, et mandatés par le Directoire pour régler la situation, Napoléon en chemin vers l'Egypte choisira, à Malte, de faire arrêter et destituer neuf officiers membres du corps expéditionnaire, comme chefs de l'insurrection armée à Rome. Ne nous étonnons pas. Le sens de l'équité et de la justice, nous l'avons vu, est loin d'être aiguisé chez Napoléon Bonaparte. 

Finalement, autant Masséna que Berthier avaient dû, en effet, posséder un insatiable désir de richesse, eux qui jouissaient déjà des plus grands honneurs et des plus belles richesses. Masséna était à la tête  "d'une fortune colossale : 200.000 fr. en qualité de chef d'armée ; 200.000 francs comme duc de Rivoli, et 500.000 francs comme prince d'Essling : au total, neuf cent mille francs par an"  ("Mémoires du général baron de Marbot", Tome II,  "Madrid -Essling - Torrès-Védras", Les Postillons de Massénap. 303,  Paris, Plon, Nourrit et Cie, 1891).  

Quant à Berthier, premier sur la liste des maréchaux, en 1804, il est fait Grand Veneur la même année, à la fin de laquelle il portera le globe impérial lors du sacre de l'empereur, ce qui lui donnera le privilège de paraître sur le fameux tableau de David. En 1805, il acquiert le château de Grosbois (Boissy-Saint-Léger, Val-de-Marne), il est alors déjà "immensément riche" (Houdecek, 2018). En 1806, il prend le commandement des grognards de la Grande Armée, après la victoire d'Austerlitz, devient Prince  de Neuchâtel la même année, qualité assortie d'une dotation de 1.200.000 francs de rentes. Il devient prince de Wagram en 1809, avec pour majorat le domaine du château de Chambord, avec une centaine d'employés pour sa maison  (op. cité). 

"Au prince de Neuchâtel, major général de la Grande Armée (23 septembre 1807) : Mon cousin*, vous trouverez ci-jointe une lettre au ministre des Finances, par laquelle je lui ordonne de mettre onze millions à votre disposition.... Vous disposerez de ces onze millions de la manière suivante. Vous garderez un million pour vous, que vous prendrez moitié en argent et moitié en rentes sur l'État au cours de 85 francs.

 Vous donnerez 600,000 francs... aux maréchaux Ney, Davout, Soult et Bessières, et 400.000 francs.... aux maréchaux Masséna, Augereau, Bernadotte, Mortier et Victor.... quant à la somme qui leur est donnée en argent, ils doivent l'employer à se procurer un hôtel à Paris, qui doit être compris dans le fief que nous érigerons en leur faveur, étant nécessaire que les possesseurs des grands fiefs aient un hôtel à Paris (...) Vous donnerez 200.000 francs à chacun des généraux dont la liste est ci-jointe."  

"Correspondance de Napoléon Ier", op. cité, Tome 16,  p. 44-45

* manifestation d'affection de la part de Napoléon, Berthier ne fait nullement partie de sa famille.

La liste des présents en argent sonnant et trébuchant (10.900.000 francs au total) contient, en plus des noms déjà cités, 29 bénéficiaires, presque tous généraux  : 

 - Pour 200.000 francs, les généraux Oudinot, Songis, Chasseloup, Walther, Dupont, Grouchy, Nansouty, Belliard, la Riboisière, Suchet, Junot, Marmont, Saint-Hilaire, Friant, Duroc, Legrand, Caulaincourt, Savary, Lauriston, Caffarelli, Bertrand, Rapp, Mouton, Clarke, Ordener.

-   Pour 50.000 francs, le général Reille et le colonel Lacoste

-  Pour 200.000 francs, M. de Ségur et le sénateur Beauharnais

       (Op. cité)

 

    Beauharnais     :  Claude de Beauharnais, 1756-1819, sénateur de 1804 à 1814, fait comte de l'Empire en 1808, "chevalier d'honneur de l'Impératrice Marie-Louise et grand-croix de l'ordre de la Fidélité de Bade (le 24 février). Il obtient le 30 juin 1811 le titre de grand officier de la Légion d'honneur."  (notice biographique de Wikipedia).   

masséna-berthier

 

 Le plus beau, c'est qu'il s'était passé à peine trois mois entre cette remise de cadeaux faits par l'empereur et une précédente, accordée à Tilsit par décret du 30 juin 1807  pour "services qui nous ont été rendus dans la campagne de Pologne", où figuraient déjà beaucoup de généraux  largement dotés par ce décret (à bon compte naturellement, sur des terres de Pologne, cf. tableau ci-dessous),  et à nouveau très généreusement gratifiés en septembre. 

 

On ne cesse de voir (et les exemples de dotations somptueuses sont légions au travers de la correspondance de Napoléon), le gouffre que Napoléon Bonaparte avait créé entre cette classe d'hommes, civils et militaires, qu'il avait élevés en dignité et enrichissement, et la grande majorité de la population laborieuse française, qui n'avait que sa force de travail pour obtenir sa subsistance.   

napoleon-decret 30 juin 1807-tableau dotations.jpg

 

                                                 Correspondance de Napoléon Ier, op. cité, p. 378-379.  

biblio

                   

 

                            BIBLIOGRAPHIE 

 

 

 

 

   

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HUGON Alain, 2004,  Révoltes et désertions dans les journaux et mémoires militaires – Esâgne-Russie, 1808-1813article de l'ouvrage collectif Cris et écrits — Dire les révoltes à l'époque moderne, dirigé par Aleksandr Lavrov, Marie-Karine Schaub, Alain Hugon () et Malte Griesse,  aux Presses universitaires de Rennes, pp. 111-130.  

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